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Retour au centre

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Barack Obama et Mitt Romney (Source : AP Photo/David Goldman)

L’Amérique revient vers le centre. C’est le sens que l'on peut donner aux résultats des dernières élections, notamment au Sénat. C’est aussi la preuve qu’à trop se focaliser sur un discours simpliste et idéologique, le parti républicain a considérablement réduit la base de ses supporters. Qu’il s’agisse des sujets aussi variés que le mariage homosexuel, l’évolution, la criminalité, le changement climatique, la politique économique, les Américains ne sont pas aussi divisés qu’on voudrait le croire trop souvent. Les oppositions pro-life vs. pro-choice, les fragmentations politiques et idéologiques, ne caractérisent pas une société américaine qui, en dépit d'indices de confirmation véhiculés par les cercles politiques, médiatiques et communautaires, s’avère encore très pragmatique.

Ce pragmatisme est à l’œuvre aujourd’hui avec des négociations sur la falaise fiscale qui semblent avancer mieux que prévu. Même certains journaux (le Washington Post en particulier) se réjouissent de l’affaiblissement, relatif, de l’influence de Grover Norquist – ce partisan du non-compromis en matière de hausses d’impôts. Il doit s’étendre à bien d’autres sphères de la société.

Comme beaucoup de sociétés occidentales, celle des Etats-Unis est tiraillée entre l’héritage progressiste/relativiste de la "révolution culturelle" des années 1960 et le raccrochage aux valeurs traditionnelles. Plus qu’un retour aux valeurs traditionnelles (façon Tea Party), la société cherche de nouveaux repères en matière de morale sociale. Car même si le pays repose sur le "règne de la loi", il a également toujours reposé sur une idée relativement solide du bien commun, généralement peu marquée idéologiquement.

Dans un tel contexte, l’Amérique ne peut plus compter sur le "jargon camouflage" ou cette forme de discours convenu et instrumental qui a guidé le GOP – un cas typique étant le débat sur la santé trop souvent réduit à la simple opposition "marché contre rationnement" ; un autre étant le rejet de tout débat sur les inégalités, renvoyé à sa plus simple expression de "lutte des classes". De même, la théorie dite du Trickle Down a fait long feu : améliorer les conditions des "créateurs de richesses" par des baisses d’impôts et une réglementation plus souple ne favorise pas la croissance mais accentue les inégalités et pérennise une certaine forme de ploutocratie.

Ce recentrage s’impose et devient nécessaire au regard des lignes de fractures économiques qui se sont creusées (ou vont se creuser) au cours des dernières années :

- Une démographie défavorable qui accroît les dépenses de retraites et de santé et pèse sur une génération plus jeune – qui souffre par ailleurs d’avoir eu accès à une formation, une éducation de moins bonne qualité.

- Une disparité croissante entre les très hauts revenus et la classe moyenne. Les forces qui expliquent le creusement des inégalités ne sont pas que domestiques (globalisation) ou politiquement maîtrisables (progrès technique), mais les outils susceptibles de les atténuer (salaire minimum, progressivité de la fiscalité) sont absents.

Ces enjeux dépassent le seul cadre du débat technicien ou idéologique. Ils sont politiques bien sûr. Mais ils ne seront résolus que si l’Amérique réussi à reconstruire une vision plus partagée du bien commun. Le défi est énorme mais un timide retour au pragmatisme centriste, ce ciment des approches bipartisanes, semble se dessiner…

Evariste Lefeuvre, Chief economist Amériques, Natixis New York, auteur de La Renaissance américaine, Editions Leo Scheer.


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